Ah, ça y est, j'ai enfin fini cet
article (pour celleux qui l'attendaient). C'est bien, rappelez-moi
quand je ne finis pas mes articles, ça me motive :)
Deuxième article et déjà le Ronchon
Blog risque fort de se transformer en Ronron Blog (ou presque)
puisqu'il va être question de remercier les gens grâce à qui j'ai
parcouru tout ce chemin et avec qui je compte bien marcher encore un
bon moment sur les sinueuses routes de la connaissance. Promis, la
prochaine fois je ronchonne pour vos beaux yeux, on aura qu'à dire
que c'est un hors-série prématuré. J'y peux rien, je suis sur mon
nuage en ce moment. Mais lisez quand même, on ne sait jamais, ça
pourrait être intéressant. Vous pourriez même être dedans.
***
La question qui va se poser ici pour
moi n'est autre que le fameux : oui, mais par où commencer ? A
partir de quand ai-je osé me considérer comme féministe ?
Qu'est-ce qu'il y a eu avant ?
Je peux peut-être commencer par
ronchonner tiens, à propos du terme « ronchon »
justement ! C'est un mot que je trouve très péjoratif en fait.
On dit de quelqu'un qu'il ronchonne quand il se plaint pour un rien,
on a une image de ce dont il se plaint comme de quelque chose de
superficiel et je n'ai pas du tout l'impression que c'est ce que je
fais. Oui mais voilà, c'est aussi l'adjectif dont je me vois
affectueusement affublée par l'une de mes twittos, Cécile, sans
doute parce que je trouve plus souvent matière à râler qu'à
m'émerveiller devant la beauté du monde... quoi que... la véritable
« excuse » c'est que je n'avais pas d'inspiration pour le
nom de mon blog et que celui-ci me semble assez pratique. Pratique
dans le sens où j'essaie autant que faire se peut de garder un ton
léger, de prendre du recul et de dédramatiser quand c'est
possible ! Ça ne l'est pas toujours, hélas.
Ça c'est pour la genèse du titre de
mon blog. Attaquons-nous à ma genèse de féministe
maintenant.
Les cours de philosophie au lycée,
ma super prof de philo d'alors et mon amie Liline.
Ayant
toujours été étiquetée “intello” par ma famille malgré des
résultats scolaires franchement dans la moyenne et même parfois en
dessous, tout le monde m'a dit que j'allais adorer la philo au lycée
! Tout le monde a eu raison pour une fois... et pourtant les
personnes n'ayant jamais fait de philo et condamnant absolument la
chose sont légion par chez moi. Tiens, ça me fait penser à un
autre truc qu'on condamne sans savoir ce que c'est...
(Je ne sais pas ce qu'est
le féminisme mais j'y suis fermement opposé)
Cette comparaison me permet de dénoncer
le fait que l'ignorance en milieu scolaire (voire plus loin dans la vie adulte)
est considérée comme incroyablement cool, là où ceux qui
réfléchissent sont chiants et infréquentables. C'est une chose qui
a tendance à me pousser vers une certaine forme d'élitisme.
J'essaie de lutter contre cette envie
d'exclure de ma vie tout ce qui est mainstream parce que c'est ce
même milieu mainstream qui fait les choses superficiellement,
qui glorifie l'ignorance et empêche la curiosité,
l'originalité et la créativité de trouver leur place. Si je
lutte contre mon préjugé c'est parce que malgré ça, on peut avoir
besoin de passer par le mainstream pour découvrir quelque chose, que
l'accessibilité peut ne pas être du nivellement par le bas, qu'on
peut faire quelque chose pour tous et le faire bien. Je cherche des
arguments, c'est vous dire si je ne suis, aujourd'hui encore, pas
tout à fait convaincue par ces propos, mais je sais qu'il y a un
certain mépris de classe dans le fait de dénigrer ce qui est
accessible à tous et reconnaître ça, c'est reconnaître qu'il y a
un problème dans ma façon de penser (moi qui pourtant suis loin
d'être une bourgeoise, mais c'est une question d'accès à la
culture etc... enfin tout ceci fera peut-être l'objet d'un autre
article). Pour faire court je dirais que ma capacité de tolérance
est plutôt limitée et que c'est un frein à ma quête de
savoir, il me faut travailler là dessus. Mon amie Liline,
rencontrée au lycée, est plus ouverte je pense et c'est aussi une
personne avec qui j'ai débattu de sujets divers et variés comme la
foi, l'amour, la liberté, l'instinct... ceci dit, pour ma défense,
je déteste rarement quelque chose sans raison.
Bon, c'est quoi la philo alors ?
La philo c'est ne pas tout prendre pour argent comptant. C'est déconstruire ce qui nous semble évident depuis toujours. Quand on a
des convictions, se demander d'où elles viennent et si elles sont
justes. Et si j'ai souvent entendu mon père dire que c'est
complètement inutile sans qu'il n'en ai jamais fait, je trouve qu'il
n'y a rien de plus faux. Si on ne pensait pas le monde, on ne ferait
que le subir en continu. La révolution, la fin de l'esclavage, les
droits des femmes, des homosexuels ? Pour quoi faire ? On va pas non plus
réfléchir aux conséquences de nos actes, on a raison et puis c'est
tout. Oh wait... subir le monde, c'est pas un truc qu'on cherche à
nous présenter comme cool justement ? Bon, bah voilà, vous
avez tout compris. Tout ça est très résumé bien sûr, il y a
des millions de raisons pour lesquelles la philo est utile.
Ensuite on pourrait discuter de l'utilité de l'utilité peut-être...
si on réduit tout à l'utilité pratique dans l'absolu, la vie n'a
aucun intérêt.
Par ce biais de déconstruction, je
suis partie de la philo pour arriver au féminisme intersectionnel.
C'est pour moi une suite logique, ayant toujours aimé me poser des
questions et me remettre moi-même en cause. Je suis têtue mais les
bons arguments font mouche parce que j'ai une capacité d'écoute
dont je suis plutôt fière. En relisant des choses écrites au
lycée, je me rends compte à quel point le féminisme allait
apporter pas mal de réponses aux questions que je me posais et
confirmer ce que je ne faisais que soupçonner. Le sexisme me sortait
déjà de mes gonds, autant que le racisme ou l'homophobie
d'ailleurs, je pressentais que cette colère était justifiée.
Lutter contre ma tendance à
l'élitisme : mon amie Julie.
Je pense qu'elle sera surprise de
se retrouver ici et pourtant elle y a toute sa place. Premièrement,
parce qu'elle est la seule personne au monde dont je sois sûre
qu'elle m'aime autant que je l'aime et c'est vraiment fondateur. En
général, j'aime beaucoup trop les gens que j'aime, vraiment
trop et tenir la comparaison avec cette démesure d'amour relève de
l'exploit. L'amour de Julie tient la comparaison. Et pourtant,
on n'est pas du tout parties sur de bonnes bases puisque j'étais
dans une période de dépression à tendance fortement misanthrope
quand on s'est rencontrées. Elle s'est pris plus d'un coup de griffe
avant que je ne vienne ronronner à ses oreilles. Mais je m'égare.
Ce que je veux dire ici c'est que Julie et moi avons deux visions du
monde très différentes, deux personnalités très différentes. Et
ce qu'il y a de bien c'est que lorsque ces visions se confrontent ou
qu'elles semblent se confronter, on peut passer la nuit à en
discuter (enfin c'est plus difficile maintenant avec la distance)
jusqu'à se comprendre. Et jamais je ne me sens menacée d'un
jugement implacable. Je suis sortie grandie des discussions que
nous avons eu et elles continuent de me faire réfléchir
aujourd'hui. Vous avez ce genre d'ami, vous ? Si oui, alors vous
êtes chanceux.
Une autre facette de Julie qui me
fascine c'est qu'elle lit absolument tout ce qui lui passe entre les
mains et là où je m'offusque de toutes ces sorties de bouquins
copies de Twilight et compagnie, elle va les dévorer pour savoir
si vraiment c'est bien ou pas. Don't judge a book by its
cover, c'est Julie. Et elle a bien raison quand elle dit que
l'important c'est de lire, peu importe quoi, du moment qu'on lit.
Un pas de plus vers l'intersectionnalité, mes échanges avec la journaliste Audrey Pulvar.
Alors oui, je sais, récemment j'ai été super ronchon vis-à-vis
d'Audrey Pulvar mais ceci mis à part, honnêtement, vous avez lu
l'Enfant-bois ? Ce livre est un chef d’œuvre et pourtant
je n'en avais pas entendu parler à sa sortie ! Je l'ai prêté
et j'avoue qu'il me manque, même si je préfère le savoir entre des
mains amies que dans un carton pour des années avec la majorité de
mes livres, restés en France faute de véritable « chez
moi »... En dehors de ça, mon cœur a cogné fort le jour où
j'ai entendu son billet concernant Guerlain, je me suis sentie moins
seule dans ce monde où personne ne s'offusquait alors que j'étais
intérieurement en ébullition. Rendons à Pulvar ce qui est à
Pulvar, une ouverture vers le féminisme, une inspiration un peu
comme une étoile filante. J'aurais bien aimé qu'elle continue à
briller un peu plus longtemps...
De la culture en général....
...je parlerai peut-être plus tard, ça mérite très certainement un
article ou deux. D'ailleurs je l'annonce ici : mon prochain
article ne sera pas tellement ronchon non plus puisqu'il parlera de
la chanteuse Tori Amos.
Des livres, des cours et une
correspondance avec ma prof de littérature.
La
fac a été une période déterminante sur ma position en tant que
féministe, parce qu'il s'est passé pas mal de temps avant que je
n'assume vraiment qui je suis. Lors de choix de sujets pour des
exposés, je m'orientais souvent vers ceux concernant la situation de
la femme. Je répondais à ma voisine qui s'exclamait alors « toi,
je parie que tu es féministe ! »
un faiblard « un peu, oui ». Un peu, oui ?
Mais qu'est-ce que c'est que cette réponse ? Bonjour je suis
une féministe modérée, je suis modérément pour l'égalité et je
dis « s'il vous plaît » avec le sourire et l'échine
courbée comme il convient. Il faut dire que je suis tombée sur des
phénomènes, entre cette dernière, qui dès lors m'affirma
fièrement être misogyne, et une autre camarade qui était contre
l'avortement, je me suis sentie très seule ! Et surtout
particulièrement déçue, moi qui pensais rencontrer à la fac, des
gens avec qui j'aurais été sur la même longueur d'onde (choix
d'études précises après le bac donc supposition
hasardeuse de points communs,
c'est un peu ce que tout le monde nous promet...), je me retrouvais
parfois face à des fous furieux. Mais le milieu hostile ça forge le
caractère, on finit par s'affirmer et par avancer ses arguments. Du
moins, ce fut le cas pour moi heureusement, même si l'adversité ne
fut pas une partie de plaisir.
Heureusement, les
discours de certains de mes professeurs m'ont redonné un peu
d'espoir et parmi eux, celui qui m'a le plus marquée, celui de Maria
Tang, ma prof de littérature, intervenue lors d'un cours sur les
fameuses « gender studies » par un professeur
Canadien (si ma mémoire est bonne, quant à son nom je l'ai bel et
bien oublié!). Je ne sais pas combien de temps a duré
l'intervention mais cette femme qui m'avait déjà soutenue à une
époque où je désespérais, m'a fait comprendre que j'ignorais
encore énormément de choses à ce sujet. J'ai quitté
l'amphithéâtre les yeux plein d'étoiles, le cœur léger et le
cerveau tout retourné. Et c'est l'effet que me fait chacune de
ses lettres. Allez, je l'avoue, cette personne est probablement la
personne que j'admire le plus au monde. Je ne regrette pas
d'avoir eu le courage un peu fou de lui écrire et de lui raconter
mes aventures depuis mon arrivée sur le sol anglais ! Avant de
franchir le pas, fidèle à moi-même, je me suis demandé si c'était
une bonne chose, si je ne me donnais pas trop d'importance et si,
avec le peu que je connaissais d'elle, je ne l'idéalisais pas tout
simplement. Plus je reçois de lettres et de cartes, plus je suis
persuadée que j'ai vu juste et que j'ai bien fait de prendre le
risque de passer pour folle (ce que je suis un peu quand même). Je ne l'effraie décidément pas puisqu'elle continue de
répondre à mes lettres et ces temps-ci c'est plutôt moi qui prend
du retard dans notre correspondance ! Honte à moi !! Quoi
qu'il en soit, elle ne manque jamais une occasion quand il s'agit de
me donner des conseils de lecture et je ne manque jamais une occasion
de me jeter sur ces ouvrages. Dernièrement, elle m'a recommandé le
blog de Sarah Ditum et plus précisément l'article concernant
l'intersectionnalité qui m'a beaucoup fait réfléchir (vous noterez
qu'il y a toujours des choses qui me font réfléchir, maudite
intellectuelle que je suis!) et m'a permis d'affirmer mes positions. Je pense que nous avons besoin de l'intersectionnalité (concept) autant que de l'intersectionnalité (mot), vous suivez ? Si non, j'y reviendrai peut-être également, ça mérite d'être expliqué.
Bref, je ne
saurais trop comment rendre véritablement hommage à cette grande
dame qu'est Maria Tang et sans qui je ne serais sûrement pas où je
suis en ce moment ! Le simple fait de savoir qu'elle est à
portée de lettre est incroyablement rassurant. J'ai envie de croire
qu'il y a quelque chose de stable dans ce monde.
La “communauté” féministe de
twitter.
Je suis une féministe 2.0 c'est un fait. J'ai
manifesté dans ma vie pour quelques causes mais jusqu'à présent
jamais pour les femmes. A ce sujet si quelqu'un sait où je peux me
renseigner pour savoir où se trouvent les manifs pro-IVG en
Angleterre... je suis preneuse ! En revanche, même si je suis
souvent derrière mon écran ou derrière un bouquin, quand j'en ai
l'occasion je parle autour de moi de ce qui pose problème, ce qui,
comme je l'ai expliqué dans mon premier article, demande de se
lancer dans le vide avec détermination et d'être prêt à
entendre les mêmes réactions en boucle, souvent assez
désespérantes.
Oui, je parle d'égalité quand
j'exerce mon métier, j'invite mes élèves à se poser des questions
sur leur façon de voir le monde. Et si j'entends des remarques
homophobes, je réagirais certainement différemment de certains
collègues entendus/lus ici et là qui ignorent le problème, en
rigolent ou abondent carrément dans le sens des propos tenus par
certains élèves. Dans un climat actuel pour le moins tendu
sur ces questions, je sais que je prends des risques et je trouve
révoltant que ce soit « risqué » de faire réfléchir
sur l'égalité. En 2014, ça ne devrait être ni plus ni moins que
normal. Je ne prends rien de tout cela à la légère, je
n'impose pas non plus mon point de vue et je ne cherche à convertir
personne à quoi que ce soit.
Voilà, tout ça pour dire que non, le
fait de parler féminisme sur twitter ne m'empêche pas d'appliquer
mes convictions à la vie réelle. Je dirais au contraire que les
féministes de twitter m'ont appris énormément de choses !
Parce que rares sont celles qui se contentent de 140 caractères et
beaucoup alimentent régulièrement leur blog ou les blogs d'autres
féministes. Évidemment on peut mentionner l'article de Mar_Lard sur
le sexisme dans le milieu geek (que vous pouvez trouver sur le blog
Genre dans les liens à droite de cet article), qui a ouvert les yeux
de beaucoup et face auquel on a eu des réactions de déni typiques. Quoi qu'il en soit il a fait grand bruit et c'est une bonne chose.
Grâce à ces féministes, je me suis informée. J'ai eu du mal à
comprendre, j'ai hésité, j'ai changé d'avis, j'ai tenté de
peser le pour et le contre et parfois je ne sais toujours pas dans
quel camp je me trouve mais je sais que ce sont d'abord les
concerné.es qu'on se doit d'entendre et que ça n'est pas toujours
moi donc j'ai appris à me taire (pas
comme dans cet article ou je suis quand même bien bavarde).
Il en reste encore... des
inspirations, pas toutes féministes mais j'ai dépassé les 2500
mots, je vais peut-être me calmer maintenant si vous le voulez bien.
Merci.
***
Vous avez lu jusque là, vraiment ?
Vous m'épatez ! Promis je fais plus court la prochaine fois...